Les journées sociales de l’année 2023 avaient comme thème “S’approprier un processus électoral mal engagé“. Elles voulaient préparer les différentes parties prenantes au processus électoral à aider le pays à changer de trajectoire.
Même si, à l’époque, on avait des raisons de s’inquiéter, on était loin d’envisager que les élections de décembre 2023 allaient se passer de la manière dont le pays les a vécues, et que la mise en place des institutions allait en souffrir autant.
La CENCO décrit en des termes forts et inquiétants les conséquences possibles des élections passées sur la consolidation de la démocratie en RDC :
- “Il se pose des questions sur la perception que le peuple congolais aura du prochain Parlement… Cette situation comporte un grand risque de rentrer au monopartisme”.
- “Nous avons découvert… un nombre impressionnant de votes parallèles avec les machines à voter trouvées chez les particuliers”. Cette tricherie à ciel ouvert pourrait, si on n’en tire pas des leçons courageuses, enterrer la démocratie en RDC.
Dans sa lettre, la CENCO constate que le peuple est sorti, de cette expérience, hébété, désillusionné, traumatisé, scandalisé et même anesthésié. Ainsi, quand le peuple est muselé, les élus corrompus, et qu’au parlement l’opposition ne représente que 6%, comment raviver le rêve des congolais pour la démocratie ? Comment remobiliser l’opinion publique, la société civile, les mouvements citoyens, et les partis politiques ? Comment espérer un changement quand il existe de plus en plus des tentatives de musèlement des opinions contraires ou simplement différentes ?
L’on constate ainsi que toutes les parties prenantes au processus de consolidation de la démocratie en RDC semblent aujourd’hui neutralisées ou découragées.
La RDC risque, s’il n’y a pas de sursaut collectif pour “sauver la démocratie en péril”, de basculer dans la dictature de la pensée unique ou du parti unique.
Au regard de ce contexte sombre, l’objectif de ces journées sociales sera d’essayer de “raviver” la foi en la démocratie en RDC par un sursaut collectif qui tire sa force dans l’engagement collectif du peuple congolais depuis la Conférence nationale souveraine et le contrat social scellé à Sun City et confirmé par l’engagement citoyen durant les quatre cycles électoraux passés.
Les journées sociales 2024 du CEPAS sont donc organisées sous le thème “Raviver le rêve démocratique en République Démocratique du Congo” avec le programme suivant :
Premier jour :
- De la conférence Nationale Souveraine (CNS) aux élections de 2023. Le combat des Congolais pour la démocratie. Ce qui a marché. Ce qu’il faut corriger. Sur quoi on pourrait construire (prof Thierry Nlandu)
- Retour sur les cycles électoraux de 2011-2018, 2018-2023 et leur impact sur l’avenir de la démocratie (prof Rigobert Minani, SJ)
Second jour :
- Comment crédibiliser la CENI et assurer un processus électoral crédible et consensuel (Ithiel Batumike, EBUTELI)
- Au vu du nombre exagéré de partis politiques en RDC, comment assainir l’environnement politique et mettre fin au clientélisme familial dans le chef des partis politiques (prof Ngoma Binda)
- Comment garantir la bonne gestion des fonds alloués à la CENI et réduire l’impact de l’argent et de la corruption pour les prochaines élections (M. Madianga Valéry, Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local, CREFDL)
Dernier jour :
- Comment raviver les mouvements sociaux. Faire la différence entre les vrais et les faux (Bienvenu Matumo, membre de la Lucha)
- Comment faire de la dynamique féminine une force de changement (prof Aga Ghislaine, Ecole Supérieure de Formation des Leaders de l’Unité, ECOFORLEADERS)
- Au vu de l’éclatement actuel de la société civile, comment la refonder sur base des valeurs républicaines et démocratiques. Comment elle peut encore être aujourd’hui le fer de lance de la démocratie en RDC (Me Jean Bosco Lalo, CALCC)
Quatre objectifs sont poursuivis par ces assises :
- Rappeler à l’opinion le combat des Congolais pour la démocratie
- Définir les réformes à promouvoir et comment les rendre opérationnelle
- Identifier les forces sociales à remobiliser pour peser sur la reconfiguration de la démocratie en RDC
- Proposer les axes d’action pour chaque groupe d’acteurs
JOUR 1
De la Conférence nationale souveraine aux élections de 2023 : le combat des Congolais pour la démocratie
Les journées sociales de l’année dernière voulaient préparer les différentes parties prenantes au processus électoral à aider le pays à changer de trajectoire pour que les élections de décembre 2023 qui pointaient à l’horizon soient mieux organisées que les précédents cycles électoraux.
Malheureusement, nous avons tous été témoins des déficiences énormes de notre système électoral (machines à voter retrouvées chez des particuliers, montée des discours attisant la haine gratuite, gabegie dans la gouvernance financière électorale, etc.). Par ailleurs, on était loin d’imaginer que la mise en place des institutions allait autant souffrir d’un système démocratique qui tend de plus en plus à s’aristocratiser autour d’une minorité qui profite de la mangeoire du pouvoir, frappant en même temps d’ostracisme le reste de la population qui n’intéresse les politiques que lorsqu’il faut solliciter auprès d’elle un mandat public.
Cet état des choses est en train d’entamer la confiance dans les institutions et dans un système électoral qui n’est là que pour servir les intérêts d’une minorité au pouvoir. Au regard ce contexte sombre, l’objectif des journées sociales de cette année est d’essayer de « raviver » la foi en la démocratie en RDC par un sursaut collectif qui tire sa force dans l’engagement collectif du peuple congolais depuis la Conférence nationale souveraine et le contrat social scellé à Sun city et confirmé par l’engagement citoyen durant les quatre cycles électoraux passés.
Notons que les journées sociales de cette année sont coorganisées par quatre structures : le Centre d’Etudes Pour l’Action Sociale (CEPAS), l’Institut de recherche EBUTELI, l’Université Loyola du Congo (ULC) et le Centre d’action pour dirigeants et cadres d’entreprises au Congo (CADICEC).
Pour ce jour d’inauguration, c’est à 9h40 que les travaux ont démarré. Après la prière d’ouverture présidée par le modérateur du jour (père Rodrigue Ntungu, sj), le représentant du Recteur de l’ULC (Père Jean Mboma, sj), le Directeur du Think Tank EBUTELI (M. Fred Bauma), le Président du Conseil d’administration du CADICEC (Honorable Didier Mumengi, représenté) et le Directeur du CEPAS (Père Alain Nzadi, sj) ont tour à tour prononcé leurs mots de circonstance, avant d’inviter les participants à l’extérieur pour prendre la traditionnelle photo officielle des Journées et partager un cocktail.
Après les échanges avec la presse, les travaux ont commencé par le premier panel animé par le professeur Thierry Landu et le père Rigobert Minani.
Prenant la parole le premier, le professeur Thierry Landu, co-fondateur du CLC (Comité Laïc de Coordination), a entretenu l’assistance sur un thème qui s’inspire de son parcours d’activiste social : « En route vers la démocratie ». Il a rappelé les nombreux combats qui ont parsemé la longue marche vers la démocratie en RD Congo, depuis l’annonce de l’ouverture du champ politique par le maréchal en avril 1990, en passant par la Conférence nationale, la marche des chrétiens de 1992, la rixe éternelle entre les gouvernants et la société civile autour des processus électoraux (2011, 2018 et 2023), etc. A l’en croire, le peuple congolais ne doit pas avoir peur de ses erreurs car elles sont le signe d’un peuple debout, dans toutes les péripéties de son histoire. Les signes de vitalisme d’un peuple debout se remarquent par quelques victoires, aussi modestes soient-elles, que le panéliste à tour à tour commentées, pour terminer : victoire sur notre propre peur, transfert de la peur dans le camp du pouvoir, adhésion aux idéaux de la société civile de certains membres du camp du pouvoir, une Eglise catholique debout et aux côtés du peuple, le sang versé par nos héros de la démocratie, le rêve commun pour un Congo meilleur…
Prenant la parole ensuite, le père Rigobert Minani a revisité les cycles électoraux de 2011 et de 2018 pour mieux comprendre les dysfonctionnements constatés en 2023. D’après lui, il serait difficile de comprendre le chaos électoral de décembre 2023 sans le situer dans le prolongement des falsifications des processus électoraux passés, particulièrement ceux de 2011 et de 2018. En effet, l’amélioration de la gouvernance en RDC exige que l’on revisite le cheminement du pays pour anticiper ce que pourrait être la trajectoire de la démocratie sur base de l’expérience de 2023. La thèse du panéliste est la suivante : nous récoltons les conséquences des dérives commencées déjà en 2011 avec le changement constitutionnel qui avait fait sauter de la constitution de la RDC le deuxième tour de l’élection présidentielle. Il faut noter que depuis les cycles électoraux précédents, les gouvernants se lancent toujours dans des manœuvres de survie : glissement, tripatouillage du processus électoral, intimidations, débauchages, etc. Le panéliste a fini par laisser des questions ouvertes à approfondir dans les ateliers : Devant le chaos électoral de chaque cycle, faudrait-il réfléchir autrement pour maintenir allumée la flamme de la démocratie en RDC ? Comment raviver concrètement le rêve démocratique qui tend à s’étioler ? Ne devrait-on pas aller au-delà des élections pour penser notre démocratie autrement ? Quelles pourraient être des alternatives envisageables ? Comment bâtir une gouvernance plus résiliente ?
Le modérateur du jour, le père Rodrigue Ntungu, a enfin pris la parole pour diriger le débat, avant de constituer des petits groupes d’approfondissement des questions soulevées par les panélistes. Ce travail en petits groupe a été suivi par une consolidation en plénière, avant d’inviter les participants à partager un repas de clôture de la journée offert par le CEPAS.
JOUR 2
Crédibilisation de la CENI, régulation et assainissement des partis politiques, gestion financière de la structure électorale
Les travaux du deuxième jour ont démarré à 9h30. Un panel de trois conférenciers a animé les débats sous la modération de Christian Moleka, Directeur de la Dypol (Dynamique des politologues) et expert du Cepas sur les questions politiques.
Ithiel Batumike, chercheur à EBUTELI et doctorant en gouvernance électorale à l’université de Mons, a pris la parole le premier pour entretenir l’assemblée sur les pistes de crédibilisation de la CENI afin de bénéficier des processus électoraux consensuels et transparents. Le panéliste a organisé son exposé autour de quatre axes : (1) CEI-CENI: une remise en cause quasi permanente. (2) Des réformes régulières mais minimalistes. (3) Un réservoir plein à exploiter pour crédibiliser la CENI. (4) Voies de sortie pour une CENI crédible. La CEI-CENI s’est caractérisée par quatre particularités qu’il convient de noter pour une meilleure remise en question. En effet, le pays a connu quatre cycles électoraux correspondant à quatre changements majeurs. Ainsi, chaque cycle électoral a eu : sa propre loi sur la CENI, une nouvelle équipe à la direction de la CENI, un nouveau logo et son lot d’irrégularités. De manière générale, la courbe d’évolution du processus électoral en République démocratique du Congo n’a pas été ascendante en valeur ajoutée. Bien au contraire, à chaque cycle, l’organisation des élections a perdu en qualité et en crédibilité. Par ailleurs, les réformes ont été minimalistes, au point que la Commission électorale actuelle se caractérise par : (a) la politisation poussée (non tempérée) ; (b). le manque d’indépendance des animateurs au regard du processus de leur désignation ; (c). le déséquilibre entre les composantes ; (d). le manque d’un véritable contrepoids interne (Assemblée plénière dépendant d’un Bureau composé en écrasante majorité par les délégués politiques) et externe (Cour des comptes silencieuse) ; (e) l’absence de mémoire institutionnelle : le remplacement se fait au même moment ; (f) l’absence de redevabilité des membres. Comment sortir de cette impasse ? Le panéliste estime qu’il faut lancer le plaidoyer dès à présent pour la restructuration de la CENI, étant donné que 2028 n’est plus loin. Il faut surtout : (1) mettre fin à la pratique actuelle qui privilégie la nomination des membres du bureau de la CENI issus des partis politiques ; (2) favoriser l’indépendance en sélectionnant des experts neutres, sans affiliation politique.
Le professeur Ngoma-Binda (philosophe, politologue et écrivain) a enchaîné en réfléchissant sur la question de la prolifération des parties politiques et sur l’assainissement de l’espace politique en RD Congo. Son exposé a d’abord commencé par brosser les contours d’un parti politique (« un canal pour accéder au pouvoir politique ») en survolant la situation des partis politiques sous d’autres cieux pour montrer combien le nombre y est raisonnable (aucun pays cité n’a plus de 30 partis politiques). Il a ensuite focalisé son attention sur l’exception congolaise où le pays atteint un chiffre vertigineux proche du millier de partis politiques ; des pistes de réduction de ce nombre ahurissant devraient être envisagées. Enfin, le panéliste a chuté par quelques propositions pour assainir l’espace politique congolais gangrené par le clientélisme familial. A en croire le professeur Ngoma-Binda, la réduction du nombre impressionnant des partis politiques en RD Congo peut passer par leur regroupement autour des idéologies bien identifiées. On imposerait, par exemple, à tous les partis politiques partageant une idéologie similaire de se regrouper ; en même temps, on éliminerait tous les partis politiques qui n’ont pas un encrage national ou alors on opterait pour l’option d’avoir certains partis politiques uniquement régionaux pour concourir aux élections à caractère régional. Pendant qu’on y est, le philosophe s’est interrogé sur la nécessité même de l’exigence d’accéder au pouvoir par le truchement des partis politiques, dans notre contexte où la ligne de démarcation entre le pouvoir et l’opposition est presque illisible, comme en témoignage le phénomène de transhumance politique sans véritable idéal. Pourquoi ne pas prôner le « zéropartisme » comme moyen d’accès au pouvoir ? s’est-il interrogé. Enfin, concernant l’assainissement de l’environnement politique congolais, le conférencier a suggéré de le « débiologiser » en supprimant, par exemple, la pratique du suppléant lors des élections (assemblées nationale et provinciale, sénat…). On éviterait alors, comme c’est le cas actuellement, d’avoir un candidat qui remporte des élections à plusieurs échelons et qui, au final, place son épouse à l’assemblée nationale, son fils à l’assemblée provinciale, son oncle au sénat…pendant que lui-même est nommé ministre ou mandataire public !
Le troisième panéliste du jour, Valéry MADIANGA (Chercheur en finances publiques, Coordonnateur national du Centre de recherche en finances publiques et développement Local-CREFDL), a tablé sur « comment garantir la bonne gestion des fonds alloués à la CENI et réduire l’impact de l’argent et de la corruption pour les prochaines élections ». Son exposé a fait l’état des lieux de la gestion des fonds alloués aux opérations électorales en République démocratique du Congo. Le panéliste est revenu sur les faiblesses de l’administration électorale, notamment la question de transparence, le respect des principes budgétaires et du circuit de la dépense publique, la sincérité budgétaire et les pratiques de corruption. Il a fini par proposer des pistes de solution pour une gestion transparente, sincère et crédible, les mécanismes de lutte contre la corruption dans le circuit de la dépense publique et des marchés publics. Concrètement, les recommandations ci-après pourraient aider à améliorer la gouvernance des fonds alloués aux élections :
- Suppression des dépenses des opérations électorales comme étant exceptionnelles (Fonds spécial d’intervention) ;
- Migration des dépenses des opérations électorales vers le Budget-programme ;
- Harmonisation des PPM avec les outils de gestion budgétaire (PEB et PTR) ;
- Elaboration d’un budget détaillé et voté par le Parlement (crédibiliser les crédits budgétaires des opérations électorales, éviter une budgétisation forfaitaire, débat public) ;
- Respect du circuit de la dépense publique (pacte de stabilité monétaire: plan d’engagement et le PTR) ;
- Publication mensuelle des états de suivi budgétaire de la CENI ;
- Renforcement du contrôle tant interne qu’externe et des mécanismes de transparence ;
- Hébergement les fonds des opérations électorales dans un sous compte ouvert à la BCC ;
- Audit complet de la gestion des fonds publics affectés aux opérations électorales.
Ces trois conférences ont été suivis par un débat, avant de se disperser dans les groupes de travail pour débattre des questions suivantes : (1) Quelles sont les mesures appropriées de lutte contre le clientélisme familial ? (2) Comment sortir de la politisation poussée de la CENI ? (3) Quelles sont les pistes pour renforcer la transparence de la CENI et assurer son contrôle tant interne qu’externe ?
Au terne des échanges en ateliers, les participants se sont retrouvés en plénière pour une mise en commun des échanges, avant de partager un repas de clôture proposé par les organisateurs des Journées.
JOUR 3
Rôle des dynamiques sociales dans la consolidation de la démocratie en RD Congo
Les travaux du troisième jour ont démarré à 9h30. Comme le jour précédent, un panel de trois conférenciers a animé les débats sous la modération de Dr Dirk Chaka, membre de la Lucha (Lutte pour le changement) et collaborateur du CEPAS.
Madame Aga Ghislaine, Professeure à l’Ecole supérieure de Formation des Leaders de l’Unité (ECOFORLEADERS) a entretenu l’assemblée par zoom sur « comment faire de la dynamique féminine une force de changement ». Elle a axé son intervention autour de quatre points : le leadership de l’unité (féminin) dans la vision de Lubich et Duquette ; la pratique de l’unité pour la cohésion nationale et le projet d’incubation des femmes ; quelques talents au féminin en Afrique (Taytu Betul d’Ethiopie, Kimpa Vita de la RDC, Anne Zingha d’Angola, etc.) ; le projet d’un modèle de la démocratie propre à la RDC. Pour Aga Ghislaine, la RDC comme nation n’est pas encore née. Le peuple aspire au changement depuis des années et lutte sans relâche. Nos parents, cousins, frères, voisins, amis, oncles… ont péri pour le changement. Ils continuent à mourir sous nos yeux impuissants ! Les voisins, le monde se moquent de nous : un pays faible, se disent-ils. Avec des dirigeants corrompus et un peuple divisé. Ainsi, à côté des hommes qui sont majoritaires dans les postes décisionnels, toutes les femmes qui aiment ce pays doivent s’interconnecter, s’activer, s’armer et utiliser leurs propres qualités (paix, partage, bonté, créativité, authenticité, intuition, empathie) pour sauver le pays en péril.
Bienvenu Matumo (doctorant en géographie sociale et activiste du mouvement citoyen Lucha) a enchaîné en réfléchissant sur la question des mouvements sociaux : comment faire la différence entre les vrais et les faux ? Pour lui, il y a des signes qui permettent d’identifier les mouvements sociaux dont l’idéal d’origine s’effiloche au fil du temps et de l’évolution politique du pays. Pour lui, la faible idéologisation de certains membres des mouvements sociaux en perte de vitesse et constitue l’un des facteurs désarticulant l’action sociale et collective de ces derniers contre l’Etat et les autres sphères privées du public. A cet égard, ils sont marqués par une vulnérabilité politique et militante à cause de leur faible ancrage idéologique dans un contexte social précaire. D’où, conclut-il, les mouvements sociaux doivent constamment se rappeler pour qui ils combattent : rien que le peuple !
Le troisième panéliste du jour, Maître Jean Bosco Lalo (Avocat du Barreau près la cour d’Appel de Tshopo, Président du Bureau National de Conseil de l’Apostolat des Laïcs Catholiques du Congo-CALCC-) a renchéri en proposant une réflexion sur la refondation de la société civile congolaise pour qu’elle incarne les valeurs républicaines et démocratiques. Pour le panéliste, compte tenu de la faiblesse des institutions gouvernementales en RDC, la société civile demeure un acteur indispensable au processus de réforme du pays. Pour réussir son pari, la société civile congolaise doit éviter d’être instrumentalisée par les politiques qui pourraient affaiblir la puissance de ses interventions.
Après les travaux en ateliers et la pause-déjeuner, les deux rapporteurs généraux ont lu le draft du rapport général des journées sociales, avant d’accorder la parole au modérateur général des journées, le père Rigobert Minani, pour parcourir avec l’assistance les objectifs des journées et voir si ceux-ci ont été atteints ou pas. De l’avis de l’assistance, les objectifs fixés au début des assises ont été atteints ; place maintenant aux plaidoyers à lancer pour concrétiser certaines pistes de solution proposées lors des journées. Enfin, le père Alain Nzadi (Directeur du CEPAS et hôte des Journées sociales) a pris la parole pour le mot de circonstance et la cérémonie de clôture.
Signalons que toutes les conférences seront publiées dans le numéro 586 (juin-juillet-août 2024) de la revue Congo-Afrique, organe d’expression du CEPAS.
Quelques pistes d’actions (tirées des recommandations des journées)
- Renforcer la participation citoyenne entre deux élections, car la démocratie ne se limite pas au cycle électoral ;
- Lancer un plaidoyer pour la dépolitisation totale de la CENI ;
- Raviver les valeurs et les normes démocratiques, le respect de la justice sociale ;
- Rappeler la responsabilité collective pour un engagement citoyen plus efficace ;
- Rendre le Ministère de l’intérieur responsable de l’organisation des élections à travers ses organes techniques ;
- Mener une action pour que la bancarisation des fonds alloués à la CENI permette une meilleure traçabilité des décaissements ;
- Lancer un plaidoyer pour que la CENI soit gérée par les agents de carrière de service et non par les politiques ;
- Augmenter le quota des OSC ;
- Supprimer le parrainage du Président de la CENI par les confessions religieuses ;
- Supprimer la désignation au profit d’un processus de recrutement des membres de la CENI par un panel d’experts.
- Supprimer purement et simplement la pratique de la suppléance. En cas d’empêchement du candidat élu, remplacer celui-ci par le second dans l’ordre ;
- Interdire le vagabondage des postes pour décourager les cumulards
- « Débiologiser » le champ politique en proposant des lois strictes interdisant explicitement le népotisme dans les nominations politiques, les recrutements dans l’administration publique et les décisions politiques importantes.